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mardi 1 octobre 2013

Au milieu des steppes

La Mongolie comme on l'imaginait...

Quand on arrive à Ulaanbaatar, qu'on prend une auberge, on est tout de suite frappés par le nombre de tours organisés proposés. Pour la quasi totalité des touristes ici, visiter la Mongolie c'est choisir l'auberge qui vous propose le plus de sensationnel et de traditionnel au meilleur prix. Balade à cheval dans les steppes ? Une nuit dans une yourte mongole ? Tout se négocie, et en dollars évidemment.

Pour nous il était très important de ne pas passer par ces tours car payer pour partager le quotidien d'une famille ça n'a pas beaucoup de sens, l'échange est biaisé dès le départ par l'argent, et on est forcément pris pour des touristes plein aux as. Il y a aussi dans tout ça une dimension qui nous déplait, presque coloniale : le touriste bien civilisé vient voir avec curiosité et stupéfaction comment les pauvres gens de Mongolie vivent encore sans eau chaude, sans électricité et paye pour ça, ce qui parait absurde aux locaux, évidemment.

Alors on l'a fait : on a marché 2h jusqu'à la gare de bus , on s'est mêlé aux locaux et on a réussi à acheter nos billets pour Tsetserleg, dans l'Arkhangaï.
On lit partout sur le net que prendre le bus en Mongolie c'est difficile, que la gare c'est l'anarchie, que les conditions de voyage sont lamentables, qu'il y a des valises et des paquets partout... C'est faux. C'est bien moins cher que de prendre un chauffeur, à la gare les gens nous ont indiqué le bon bus tout de suite et on a même eu le droit à "Rire et Chansons" en mongol pendant le voyage, que demande le peuple ?

Nous voilà donc partis pour 8h45 de bus, dans des paysages de steppe. On a croisé des chevaux sauvages, des chameaux, des yourtes bien entendu et on a eu de la nature plein les yeux.





Première yourte aperçue
Le moment rigolo a été la pause pipi où tout le monde sort du bus et fait pipi les uns à côté des autres, femmes,enfants et hommes confondus. Et oui, ici pas possible de se cacher derrière un arbre ou un talus alors autant faire ça franchement et simplement !


Tsetserleg est une petite ville de  20 000 habitants, enclavée dans les montagnes rocheuses. A peine arrivés, nous partons à la recherche d'un endroit pour planter notre tente et passer la nuit.
En quelques minutes de marche on est déjà sortis de la ville, on marche au milieu de nulle part, on trouve enfin un endroit où se poser et on est plus qu'heureux quand on prend conscience de où nous sommes...


Le remake du logo du Routard
Le son du petit ruisseau, à très faible volume car c'est exactement comme ça qu'on l'entendait parmi les montagnes. A écouter le soir, au calme.





La végétation des steppes, très importante photo aux yeux d'Alex



La nuit on entend les chevaux au loin, les cochons, les corbeaux qui tournent autour de nous, et au petit matin on se fait réveiller par le souffle chaud d'une vache contre la toile de tente, l'occasion de jeter un œil sur le lever du soleil dehors...
Heureusement qu'on a du bon matériel de camping : on n'a même pas eu froid ! Ça permet de relativiser quand on se plaint du poids des sacs, on sait maintenant pourquoi on est chargés !

Sitôt levés, nous avons rendez-vous avec Urnaa, l'interprète de la coopérative de fileuses de laine de yak. Tout de suite elle nous parle de Papy Tamir, qui vit avec sa femme dans une yourte à 5km de la ville. Avec la coopérative, ils ont construit une serre en permaculture avec des matériaux locaux dans son "jardin" (à comprendre : morceau de steppe). Elle nous dit aussi qu'on pourra très certainement rester dormir chez lui alors on n'hésite plus et on y va !

Il se trouve que sans le prévoir, on arrive pile au bon moment : c'est le jour où la famille s'est réunie pour démonter la yourte et la remonter avec des épaisseurs en plus pour l'hiver. Quand on débarque : tout le monde mange devant le squelette de yourte !

Papy Tamir nous accueille tout sourire et nous fait visiter sa serre : courgettes, concombres, céleri, salades, radis, tomates, ciboulette, poivrons, plein de choses qui poussent dans les steppes mongoles juste grâce à un petit bâtiment en parpaings orienté plein sud, des tôles et du film plastique. A l'intérieur : 60% d'humidité et 24°C, rien de plus compliqué ! Ici c'est vraiment quelque chose d'incroyable. Il faut prendre conscience que les mongols par essence ne sont pas des agriculteurs mais des éleveurs. Ils n'ont pas de connaissance de maraichage, peu de choses poussent naturellement dans le sol. Papy Tamir c'est la révolution verte à Tsetserleg!
En revanche au niveau de la permaculture il faudra continuer notre route: il utilise des décoctions d'ail pour traiter les plants de tomate mais c'est tout... Ici pas de réflexion sur les plantes à associer pour lutter contre les parasites, pas de design mais bel et bien des rangs de salades et de radis...

Une fois la petite visite terminée, on s'attelle au montage de la yourte (appelée Ger ici) ! Un grand moment pour nous tellement intéressés par les possibilités de maisons alternatives : plus petites, démontables, etc.
On met la main à la pâte : tout d'abord poser les bâtons qui constituent la structure puis une par une disposer toutes les épaisseurs de feutre et de laine pour passer l'hiver (-50° rappelons le) les doigts dans le nez.
Voici les différentes étapes de montage :

Les bâtons à fixer sur la roue centrale, attention à bien compter les espacements !




Une toile de coton pour commencer
1ère épaisseur de feutre en bas
1ère épaisseur de feutre en haut
2e épaisseur de feutre en bas
3e épaisseur de feutre en bas
Bref vous avez compris, ça fait beaucoup d'épaisseurs !

Et les briques de lait pour empêcher le vent de passer aux pieds...



Une toile de coton pour terminer
Et des sangles qu'on leste
Et une yourte, une !
Quelle sacrée expérience de se retrouver là pile à ce moment là ! En tous cas on se dit que c'est bien possible de faire toutes ces choses sans passer par une agence !
Quand vient notre tour d'installer notre tente dans le jardin, la famille vient nous aider à son tour, même si pour nous ça prend 2 minutes contre 2h pour eux !

Ensuite nous sommes invités à entrer dans la yourte, et quand on vient juste de la terminer, on se sent légitimes de pouvoir s'y asseoir et de boire le fameux süütei Tsaï (thé salé) : du lait de vache coupé à l'eau et salé avec quelques herbes.



Dès qu'on termine son bol on est resservi tout de suite. Ils ne boivent jamais d'eau, mais des quantités astronomiques de süütei Tsaï. Il ne faut pas se mentir : ça a le goût de l'eau du riz, avec un arrière-goût de lait, ça passe un peu difficilement tout de même.

On a goûté différentes choses, quasiment toutes à base de lait : du fromage séché a l'arrière goût de parmesan, des bâtonnets de fromage séché fermenté au goût de pomme (?), des biscuits fourrés au lait battu qui ont presque le goût de beurre rance, plein de bonnes choses, héhé !
Ah oui et on a aussi goûté leur alcool maison à bases de baies : une sangria fruitée ! Là on a pu dire que c'était très bon sans se forcer à avaler !

On a ensuite fait le repas ensemble, enfin je parle des femmes car ici ce ne sont certainement pas les hommes qui vont se mettre aux fourneaux. C'est là que nous avons du évoquer notre végétarisme, accueilli par de grands rires !


Après le repas il est déjà l'heure d'aller traire les vaches et de rentrer les veaux.


Les toilettes, en plein milieu des steppes



Un veau récalcitrant
La nuit tombe et le froid avec elle. On se réchauffe avec un dernier süütei Tsaï, on se préparer à aller dans notre tente mais le couple insiste pour que nous dormions à leurs côtés dans la yourte, à la vue du poêle à bois on ne se fait pas prier... On s'installe, on leur montre des photos de nos familles, de notre mariage, on fait une partie de cartes dont on n'a toujours pas compris les règles mais le plus important est que j'ai gagné quand même !
On se couche et on s'endort en se souriant : on vient de faire exactement tout ce que la Mongolie évoque dans la tête de tout un chacun...

L'envers du décor
Ca c'est ce que vous lisez sur tous les blogs de personnes qui partent en Mongolie et honnêtement toute cette première partie a été difficile à écrire sans sarcasmes.

Car oui, le lendemain voilà que le papy prend son téléphone et appelle Urnaa, l'interprète. Elle m'annonce qu'il faut maintenant payer chacun 25000 Tugriks pour la nuit (soit environ 25€ pour deux la nuit) puisque nous avons dormi et mangé chez eux. Nous voilà scotchés.
C'est donc autour de l'argent que tout ça tournait ? Quand nous aidions à monter la yourte ils ne voyaient qu'une manière de nous divertir là où nous nous pensions aider ? Quand ils insistaient pour qu'on dorme près du poêle c'était juste pour pouvoir nous demander plus au final ?

On comprend le principe de donner de l'argent, surtout puisque nous avons mangé à leur table (même si nous avions offert des vivres) mais une telle somme, c'est exorbitant par rapport au niveau de vie local !
Le fait qu'en plus il l'appelle pour qu'elle nous transmette le message plutôt que de nous l'écrire sur un papier, et puis d'acter cela une fois la nuit passée... On passe par 5 minutes de colère intérieure puis une grande déception nous envahit.
Alors au final nous qui voulions tant éviter les tours organisés, nous voilà logés à la même enseigne ! Tu as apprécié de voir ma femme traire les vaches ? Tu as aimé le folklore du montage de la yourte ? Sors ton porte-monnaie, c'est ça l'ho$pita£it€ mongol€...

On n'a pas caché notre déception, on a décidé tout de suite d'empaqueter nos affaires et de quitter la ville. Les au revoir ont été brefs, on aurait aimé maitriser assez la langue pour leur dire "Venez quand vous voulez nous rendre visite en France, ce sera gratuit !"

Alors oui on aurait pu continuer à visiter le coin, randonner, plutôt que de repartir à la capitale mais il faut savoir que tout cela venait s'ajouter à des considérations qu'on a depuis notre arrivée dans ce pays.
D'ailleurs Alex avait commencé à rédiger un article à ce propos et on avait décidé d'attendre de voir la campagne pour savoir si on le posterait ou non, le voici :

La vérité sur Ulaanbaatar et notre ressenti
L'article choc à chaud
*Jamais vu sur les blogs*

La croix et la bannière des rencontres faciles, honnêtes et sincères (sans intérêt d'argent)
  • 5 mails envoyés sur Couchsurfing : 1 réponse (avec intérêt commercial derrière) puis 1 autre réponse mais sans suite après plusieurs relances
  • 2 mails + 2 textos pour travailler dans une ferme en Wwoofing : Aucune réponse
  • 6 mails15 textos pour rencontrer les fileuses de laine de Yak : ping pong d'interlocuteurs, faux numéros, peu d'enthousiasme, difficulté à avoir des infos
L'Ambiance à la guesthouse
Le moindre effort de parler la langue mongole (et c'est un effort, croyez-le !) est récompensé au mieux par une correction polie de ta prononciation, ou au pire par un vent magistral en provenance des steppes les plus arides. Résultat équivalent dans tous les commerces de proximité lorsque l'on arbore un merci ou au revoir en langue locale.
Chaque question posée sur la langue ou le pays semble être une discussion ennuyante à mourir pour l'autochtone.

A Ulaanbaatar, les gens semblent blasés des touristes, ou intéressés s'il y a moyen de faire une affaire concluante avec eux.
En faisant des recherches sur le Volunteering (bénévolat) en Mongolie, on ne tombe que sur des agences tour opérateurs qui te font rencontrer des familles nomades pour les aider dans leur tâches quotidiennes (traite des juments, brebis, chèvres, préparation du repas, etc.) moyennant la modique somme de 500$ la semaine! : GROS PIGEON BONJOUR (ici le son des pigeons encore)

L'Expatrié ici semble peu engagé sur l'intérêt humain.
 Il ne fait pas beaucoup d'effort pour parler la langue, il a juste trouvé le bon filon pour gagner de l'argent en montant une entreprise type boulangerie / pâtisserie française, qui n'amène que des expatriés, dont nous ! (son des pigeons encore)

Alors oui, tout le monde pourra te vanter l'expérience incroyable, émouvante et riche qu'ils ont eu avec une famille nomade dans leur Ger (yourte), et nous en croisons beaucoup, et qui estiment que leur tour à eux a été plus authentique que celui de leur voisin. Mais vu le prix dépensé pour ce genre d'expérience, tu m'étonnes que la famille ait les larmes ($_$) aux yeux !


Voilà pour l'article écrit dans un moment de sang chaud. Ne croyez pas qu'on en veut à tout le pays, on a beaucoup ri en écrivant ça. On veut vraiment écrire tout ce qu'on pense et pas seulement se cantonner à la première partie et vous faire croire que tout est joli !

Avec tout ça nous n'avons pas vu les fileuses car quand on est arrivés à Tsetserleg, l'interprète nous a clairement dit que ce n'était pas possible car trop loin et inaccessible. Il était temps de nous en faire part...
On a l'impression que tout est compliqué pour nous ici, alors on a décidé d'écouter notre ressenti, d'écourter notre séjour mongol et de partir pour la Chine. On a pris nos billets pour dans 2 jours.

Ca a été une sacrée surprise pour nous, on ne s'attendait pas à tout ça en Mongolie, on pensait faire des rencontres plus vraies et authentiques avec beaucoup plus de simplicité.
 Tout cela nous amène à repenser encore le voyage... Pourquoi et comment nous choisissons nos destinations. Ne vaudrait-il pas mieux aller directement dans des pays plus avancés au niveau de la prise de conscience écologique, mieux-vivre ensemble etc. même si le niveau de vie y est plus cher ?

Oui car comme nous sommes dans l'envers du décor, voici une autre photo des steppes, une qu'on vous montre rarement dans les catalogues de voyage


Évidemment cet article reflète notre expérience et ne veut pas faire de vérités générales. Nous n'avons fait qu'une autre ville que la capitale, n'avons rencontré qu'une seule famille...
Nous avons tout de même passé un bon moment ici, vu de très belles choses, mais le facteur humain prend hélas plus de place que les beaux paysages, et la déception nous motive à aller voir ailleurs.

On aurait aimé rencontré d'autres touristes qui partagent le même point de vue mais vraiment, tous ceux avec qui on a parlé, vantent les mérites de leur tour organisé... On se sent très à part


Si tu ne le savais pas, c'est écrit sur ton billet de bus : TOURISTE !

A part ça, on est très heureux de débarquer en Chine très vite ! 
A nous les nouvelles aventures !  

5 commentaires:

  1. Money !, Money ! ça gâche un peu les rapports humains .............mais on peut comprendre vu leur niveau de pauvreté ..à méditer...
    Bonne chance pour la suite
    Merci pour ces belles photos ( ça rassure aussi de voir vos frimousses !)
    Bisous

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  2. je comprends mieux la déception oui.... au début je me demandais de où pouvait-elle venir.... Finalement vous avez bien fait de ne mettre vos impressions qu'à la fin de votre article... tout le monde a pu ainsi ressentir ce que vous-mêmes avez ressenti le lendemain, de ce qui devait être de belles expériences mongoles.
    Hauts les cœurs !!!
    Vos prochaines aventures vous réserveront sûrement de jolis moments à nous faire partager !
    Gros bisous

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  3. Eh ben ! Je comprends votre déception. Très beaux paysages malgré tout...

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  4. Ah la la quelle chute! Sur le coup je me suis dit "oh mais la chance de tomber sur LE JOUR de l'année du démontage de ger!". Bah finalement, pas de regrets! ;)
    Faut croire que ça devient de plus en plus dur de vivre une vraie expérience authentique en Mongolie... Ça nous rappelle bien des choses! (malheureusement)
    Bon courage pour la suite!
    Pol & Ariane (suivent le fil)

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  5. Surprenant, en effet on est pas habitué à voir l'envers du décor... Mais tant mieux si vous réussissez à tirer le positif de ce genre d'expérience, et si ça vous permet de savoir encore mieux où vous allez et pourquoi. En plus pour le lecteur c'est sympa les rebondissements!!
    On attend la suite! (en vous souhaitant qu'en même des rencontres plus heureuses..)

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